Mercredi, c'était au tour des Bowerbirds et l'espace d'un instant, j'ai bien crû qu'on s'était plantés. Le loft sur deux niveaux nous semblait être une bonne idée (et on est super reconnaissants à monsieur Alex B et à Estelle de nous avoir accueilli), mais le fait de fragmenter les spectateurs entre plusieurs endroits nous faisait perdre la belle proximité et la douce chaleur qu'on avait eu chez Bux. On avait aussi voulu faire plus grand, et ce sont près de 90 personnes qu'on a pu accueillir : autant vous le dire tout de suite, on essaiera de s'adapter et de revenir à un format plus petit (pour la prochaine - qui s'annonce un peu spéciale - on ne vous promet rien pour l'instant...). On avait aussi voulu bien soigner la captation : à vouloir trop en faire, les cadreurs étaient peut-être nombreux - et on a vite choisi d'éteindre les lumières trop blanches pour revenir à quelque chose de plus tamisé.
Voilà. L'espace d'un instant, on a bien crû qu'on avait un peu raté notre coup. Heureusement, on n'avait pas invité n'importe qui. On avait trois musiciens, sans doute impressionnés de se trouver là, juste à côté de nous, à portée de main. Et en même temps vite pris d'une joie aussi discrète que profonde à pouvoir ainsi nous chanter des chansons qui nous retombaient directement dessus. Un arrosage de proximité.
Alors ils ont moins parlé que Bon Iver. Moins fait le spectacle que Patrick Watson. Moins tapé du pied que Vandaveer. Moins bu que Peter & The Wolf. Mais on savait déjà qu'avec Bowerbirds tout est question de simplicité, au moins en apparence, et d'une absence totale d'artifices (en dehors peut-être des bottes en cuir blanc de la jolie Beth). Et quand ils ont lancé leurs premiers chœurs, on savait pourquoi on était là. Puis l'accordéon et le violon sont venus envelopper d'une sorte de chaleur lancinante les mélopées de Phil. Le piano désaccordé du maître des lieux les a fait tanguer, aussi, et joliment. Puis ces chansons qui déambulent nous ont pris par la main et aussi immobile que nous étions, c'était un peu comme être joyeusement ivre dans une rue la nuit. Le moment où quand on marche on a déjà le sentiment de danser.
Au milieu trônait cet énorme tambour. C'est pas facile d'être émouvant avec une grosse caisse, disait DJ Barney, et pourtant c'est sans aucun doute le cœur de leur son. Sans lui, leurs chansons paraissent parfois un peu maigres mais dès qu'il est là, dès qu'il débarque comme ce vieux pote un peu braillard qu'on aime avec tendresse, c'est comme si elles résonnaient plus pleinement, vibrantes, ondulantes.
Restait à en finir pour la nuit : ce fût chose faite avec une reprise de Bon Iver à couper le souffle, pourtant à peine répétée une fois ou deux dans la fin de l'après-midi. Justin Vernon avait repris leur "Olive Hearts", il était normal de lui rendre la pareille. La voix de Phil plus lancinante que celle de Justin, un poil plus traînante sur les fins de phrase, donnait à "Flume" un aspect plus résigné. Moins brutale, mais pas moins poignante. Parfaite, en toute simplicité.